(1) A la mobilisation, une zone dite "des armées" administrée par l'autorité militaire est créée. Longeant les frontières, elle couvre 35 départements de la mer du Nord à la Méditerranée sur une profondeur de 150 à 200 km. L'autre partie du territoire est appelée "zone de l'intérieur". Hérité de la 1ère GM, ce concept volera en éclats dès le 10 mai 1940 lorsque l'armée allemande imposera une guerre de mouvements. En outre, l'augmentation du rayon d'action de l'aviation fera qu'aucun point du territoire national ne sera à l'abri d'un bombardement.

(2) Les groupes aériens d'observation (GAO) étaient mis à la disposition des corps d'armée et de certaines divisions (DLM, DLC, DCr) afin d'assurer des missions de reconnaissance tactique, voire de réglage d'artillerie.

(3) L'antenne radio était lestée d'un plomb à son extrémité et déroulée en vol.

(4) Delaitre Marcel, "Ça avait pourtant bien commencé". Article paru dans la revue Icare n°59, 1971, pp. 166-171.

(5) L'échelon volant est constitué des aéronefs et du personnel navigant du groupe. Il est complété par un échelon roulant, ensemble de véhicules routiers transportant le matériel et le personnel nécessaire à la mise en œuvre des avions.

1939

LES PREMIERS MOIS DE LA DRÔLE DE GUERRE

La mobilisation

A la déclaration de guerre, Romilly-sur-Seine se trouvant en zone des armées1, sa base aérienne devient "base d'opérations" obligeant son école de pilotage à se replier sur Etampes située en zone de l'intérieur. Le bataillon de l'Air 133 est dissous. Une partie de son personnel va former l'échelon d'active de la compagnie de l'Air 8/133 créée et mise sur pied de guerre dès le 27 août 1939. Renforcée par l'arrivée de réservistes, cette compagnie va assurer la gestion de la base d'opérations et le soutien aux unités aériennes qui vont y stationner. L'ancien parc de la base aérienne est rebaptisé "parc de campagne" et intégré dans la compagnie de l'Air. Le 8 septembre 1939, deux groupes aériens d'observations (GAO)2 arrivent à Romilly. Ils seront suivis par de nombreuses autres unités au cours des huit mois et demi de Drôle de guerre puis des six semaines de Bataille de France.

Le GAO 544

Le GAO 544 arrive de Bourges, sa base du temps de paix. Commandé par le capitaine Loisy, le groupe comprend 147 personnes, dont 22 officiers et est équipé de sept Breguet 27, avions d'observation totalement obsolètes. C'est la raison pour laquelle, dès le mois suivant, il est rééquipé avec des ANF Les Mureaux 115 provenant des groupes I/54 et II/54 que les pilotes vont chercher sur le terrain de Montbard-Touillon. Si ces appareils sont plus performants, ils sont néanmoins tout aussi dépassés. L'entraînement reprend sur ce nouvel appareil depuis le terrain romillon en donnant parfois lieu à quelques péripéties comme en témoigne le sous-lieutenant observateur Marcel Delaître : "Ici se place une aventure du plus haut comique. j'avais fait une mission de "panneaux" et m'apprêtais à rentrer. Enroulement de l'antenne, mais plus de plomb3 au bout, ça arrivait fréquemment. Une demi-heure plus tard, rentrant chez moi en ville, je vois un gros attroupement devant une villa. Je m'arrête, badaud comme pas un, et qu'est-ce que je vois sortir de la villa ? Un pompier tenant à bout de bras et de pincettes mon plomb d'antenne, baptisé pour la circonstance au moins bombe perforante" au grand dam du toit de la villa." 4

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Breguet 27 du GAO 544 sur l'aérodrome de Romilly-sur-Seine

Le 15 novembre suivant, le GAO quitte Romilly en faisant mouvement sur le terrain de Saint-Omer (département du Pas-de-Calais). Rééquipé à partir de février 1940 avec des Potez 63-11, il perdra deux équipages (un sur Mureaux 115 et un sur Potez 63-11) au cours des combats de mai et juin.

Le GAO 546

Stationné sur la base de Pau, le GAO s'envole pour Romilly le 8 septembre 1939 avec huit Breguet 27 et quatre Potez 25 sous les ordres du commandant Saget. Durant environ deux mois la routine va s'installer entre entraînement et construction d'abris anti-aériens sur l'aérodrome. Devant être rééquipé avec des Potez 63-11, trois équipages partent le 20 octobre à Toulouse se transformer sur ce nouvel appareil enfin moderne. Le 31, arrive l'ordre de plier bagages et de s'établir sur le terrain d'opérations de Sézanne - Saint-Rémy situé à une vingtaine de kilomètres au nord de Romilly. Le GAO va y rester jusqu'au 15 mai 1940 pour y revenir une seconde fois neuf jours plus tard jusqu'au 7 juin. Au cours des deux mois de bataille, le groupe perd deux Potez 63-11 abattus par la chasse allemande.

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Les groupes de bombardement I/15 et II/15

Ces deux groupes forment la 15e escadre de bombardement commandée par le colonel Morraglia et sont les seuls à être équipés d'appareils quadrimoteurs à savoir des Farman 222 (et quelques Farman 221). Basés en temps normal sur la base aérienne d'Avord, l'Armée de l'air avait prévu dès 1936 de les desserrer à Romilly-sur-Seine en cas de crise. Pour ce faire, un dépôt de munitions ainsi qu'une nouvelle soute à essence de 500 000 litres avaient été construits à la fin des années trente.

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Farman 222-2 du groupe de bombardement I/15

Le 2 novembre 1939, l'échelon volant5 du GB II/15, avec à sa tête le commandant Guitteny, atterrit à Romilly où trois appareils s'enlisent, conséquence d'un automne pluvieux. Le lendemain, l'échelon roulant arrive en compagnie de l'état-major de l'escadre. Trois semaines plus tard, le GB I/15, sous les ordres du commandant Quérat, rejoint à son tour la deuxième ville de l'Aube. Durant leur séjour romillon, les Farman volent peu. Entre l'adaptation de certains appareils aux lancements de tracts, les départs en permission, une succession d'inspections et surtout les mauvaises conditions climatiques rendant la plateforme aéronautique peu praticable pour ces avions pesant 18,7 tonnes à pleine charge, l'activité aérienne se limitent à quelques vols d'entraînement. Vers la mi-décembre, la nécessité d'entreprendre d'urgence des travaux de renforcement du terrain oblige l'état-major à rechercher un aérodrome de remplacement pour une durée de six à huit semaines. Le 20 décembre, la 15e escadre au complet s'envole de Romilly à destination de Reims. Le nouveau terrain convenant fort bien, le retour vers Romilly devient vite caduc. Rebaptisée "groupement de bombardement n°15" en avril 1940, l'escadre restera en définitive dans la cité des sacres jusqu'au 10 mai, premier jour de l'attaque allemande, où un sévère bombardement de l'aérodrome contraindra les deux groupes à se replier en soirée sur Saint-Yan (Saône-et-Loire). Ce départ tardif obligera la plupart des Farman à se poser à Romilly où ils passeront la nuit avant de redécoller le lendemain au lever du jour.